🌱 Chapitre I : Les Origines (2012-2013)

Mars 2012 : La Première Rencontre

15 mars 2012. Une date qui restera gravée dans l'histoire de l'e-sport. C'est ce jour-là que Thomas Mercier, 19 ans, invite quatre de ses amis dans le garage aménagé de la maison familiale. Thomas, passionné de League of Legends, jouait en solo depuis des mois et avait atteint le rang Diamond II. Mais il rêvait de plus : former une vraie équipe.

Autour de lui ce jour-là : Lucas Dubois, son meilleur ami depuis le collège, connu pour son jeu agressif et imprévisible. Maxime Lefèvre, le colosse tranquille qui excellait dans les rôles de tank. Nathan Rousseau, le petit prodige de 16 ans dont tout le monde parlait sur les forums français. Et Julien Martin, l'analyste méticuleux qui notait déjà les statistiques de chaque partie dans un cahier.

La Première Session

Ce premier soir, installés sur des chaises dépareillées avec leurs PC portables, les cinq amis lancent leur première partie ensemble. La synergie est immédiate. Thomas dirige naturellement, Lucas trouve les ouvertures, Maxime tient la ligne, Nathan fait le spectacle, et Julien appelle les objectifs. Ils gagnent. Puis encore. Et encore.

"On a gagné 11 parties d'affilée ce soir-là," se souvient AroZen dans une interview de 2020. "On s'est regardés à 3h du matin et on savait tous qu'on venait de trouver quelque chose de spécial. C'était magique."

Avril 2012 : La Naissance du Nom "Arozoir"

Le nom "Arozoir" est né d'une défaite. 20 avril 2012, le groupe décide de participer à son premier petit tournoi amateur organisé dans un cybercafé de Lyon. Ils se présentent sous le nom temporaire "Team Mercy" (du nom de famille de Thomas).

Le tournoi est un désastre. Dépassés par l'intensité d'une vraie compétition, stressés, désorganisés, ils perdent dès le premier tour contre une équipe qu'ils auraient dû battre facilement. Dans les vestiaires, l'ambiance est morose. C'est là que Lucas, avec son humour caractéristique, lâche cette phrase qui va tout changer :

"On est comme un arrosoir qui fuit, les gars. On a tout le talent, mais ça coule de partout, on n'arrive à rien contenir !"

Le silence. Puis Nathan éclate de rire. "Un arrosoir... Aroz-war ? Arozoir ?" La blague fait mouche. Au lieu de sombrer dans la déception, ils décident d'embrasser cette image. Ils seront l'Arozoir. Mais cette fois, ils arroseront leurs adversaires de victoires, pas de défaites.

Mai-Octobre 2012 : Les Mois d'Entraînement

Pendant six mois, les cinq membres de la Team Arozoir vivent une routine immuable : études ou travail la journée, entraînement le soir dans le garage de Thomas. De 19h à 2h du matin, six jours par semaine. Les parents de Thomas sont d'abord sceptiques, puis résignés, puis... intrigués. Leur fils et ses amis ont une détermination qu'ils n'ont jamais vue.

Le Développement des Rôles

• Thomas "AroZen" Mercier s'impose comme le captain et stratège. Son pseudo vient de "Aroz" et "Zen", reflétant son calme légendaire en situation de stress.
• Lucas "ShadowAroz" Dubois perfectionne son style agressif. Il devient l'assassin de l'équipe, celui qui cherche les picks et terrorise les backlines ennemies.
• Maxime "IronAroz" Lefèvre se spécialise dans les tanks. Sa patience et sa lecture défensive deviennent des atouts majeurs.
• Nathan "FlameAroz" Rousseau explose. À seulement 16 ans, son talent mécanique est déjà éblouissant. Il devient le carry de l'équipe.
• Julien "FrostAroz" Martin développe son rôle unique : joueur ET analyste. Il commence à tenir des stats détaillées sur chaque adversaire.

Les Premiers Tournois Mineurs

Entre mai et octobre, ARZ participe à une dizaine de petits tournois locaux. Résultats mitigés au début (une victoire, plusieurs top 4, quelques éliminations précoces), mais la progression est constante. Chaque défaite est analysée pendant des heures. Julien remplit des carnets entiers de notes tactiques.

Novembre 2012 : TechLAN Lyon — La Première Vraie Victoire

24 novembre 2012. La TechLAN Lyon attire 32 équipes du sud-est de la France. Prize pool : 2000€. Pour ARZ, c'est le plus gros tournoi tenté à ce jour. Ils arrivent avec leurs hoodies assortis faits maison (noir avec le logo Arozoir imprimé dessus) et une détermination de fer.

Le Parcours Victorieux

Poule A : 3 victoires, 0 défaite. ARZ domine sa poule avec autorité.
Quart de finale : Victoire 2-0 contre TeamLycée (une équipe lyonnaise établie).
Demi-finale : Victoire difficile 2-1 contre Digital Storm. Nathan réalise un quadrakill décisif en game 3.
Finale : Face à GamersUnited, les favoris du tournoi.

La finale est épique. Game 1 : défaite écrasante d'ARZ. Game 2 : victoire difficile après 52 minutes. Game 3 : le match de leur vie. À 35 minutes, ARZ est menée 15 kills à 8, avec trois inhibiteurs down. La défaite semble inévitable.

C'est là qu'AroZen fait l'appel qui entrera dans la légende de l'équipe : "On ne perd pas. Pas aujourd'hui. Suivez-moi." Un teamfight parfait près du Baron. Un ace. Un rush sur la base ennemie. Victoire.

Décembre 2012 - Janvier 2013 : La Grande Question

La victoire à la TechLAN change tout. Soudain, d'autres équipes connaissent le nom "Arozoir". Des organisateurs de tournois les contactent. Un petit sponsor local (un magasin d'informatique) leur offre du matériel. La question devient incontournable : peuvent-ils vraiment vivre de ça ?

Les Doutes et les Rêves

Fin 2012, la situation de chacun est différente :

• Thomas (20 ans) : En deuxième année de fac de commerce. Parents compréhensifs mais inquiets.
• Lucas (20 ans) : Travaille dans un entrepôt. Déteste son job. Prêt à tout risquer.
• Maxime (21 ans) : Apprenti mécanicien. Le plus terre-à-terre du groupe. Très hésitant.
• Nathan (17 ans) : Encore au lycée. Ses parents refusent catégoriquement qu'il abandonne ses études.
• Julien (19 ans) : Étudiant en informatique. Le plus analytique. Calcule les probabilités de succès.

7 Janvier 2013 : Le Serment

Ils se retrouvent une dernière fois dans le garage. Dehors, il neige. Dedans, l'atmosphère est lourde. Thomas prend la parole : "On peut continuer comme ça, en amateur, toute notre vie. Ou on peut tenter le coup pour de vrai. On a un an. Si dans un an, on n'a pas percé, on abandonne et on retourne à nos vies normales. Mais il faut qu'on essaie."

Le vote est unanime. Ils vont tenter l'aventure professionnelle. Thomas met ses études en pause. Lucas démissionne. Maxime négocie un mi-temps. Nathan promet de maintenir ses notes (il tiendra parole et obtiendra son bac avec mention). Julien jongle entre cours et entraînements.

Ce jour-là, ils établissent aussi leurs valeurs fondamentales. Thomas insiste : "Si on fait ça, on le fait bien. Pas de trash talk toxique, pas de comportements dégueulasses. On respecte tout le monde, peu importe leur origine, leur couleur, leur genre. Le gaming est déjà assez toxique comme ça. Nous, on sera différents." Cette philosophie du respect et de l'inclusion deviendra plus tard le socle de leur combat anti-raciste, mais en 2013, c'est simplement leur manière d'être.

"Ce soir-là, dans ce garage gelé, on a fait le pari le plus fou de nos vies. Et merde, on a gagné ce pari au-delà de nos rêves les plus fous."

— IronAroz, documentaire "The Rise of Arozoir" (2021)

Printemps-Été 2013 : Les Débuts Professionnels

Les premiers mois de 2013 sont rudes. Très rudes. Ils participent à tous les tournois possibles, en ligne et hors ligne. Les résultats sont... moyens. Quelques top 4, quelques top 8, aucune victoire majeure. L'argent manque. Thomas doit parfois emprunter à ses parents pour payer l'essence des déplacements.

Les Sacrifices

Lucas dort sur le canapé du garage de Thomas pour économiser son loyer. Maxime survit avec 800€ par mois. Nathan est épuisé entre le lycée et l'entraînement (5h de sommeil par nuit). Les doutes s'installent. Sont-ils en train de gâcher leurs vies ?

Mais ils continuent. Chaque jour, 6 heures d'entraînement minimum. Julien affine les stratégies. Thomas développe son leadership. Le jeu d'équipe s'améliore, match après match.

Septembre 2013 : Premier Tournoi Pro

14 septembre 2013. L'ESL France Open. Le premier vrai tournoi professionnel d'ARZ, avec de vraies équipes établies, de vrais enjeux. 16 équipes, prize pool de 10 000€, diffusion en streaming.

ARZ se qualifie pour les quarts de finale en battant deux équipes "faciles". Puis tombe sur aAa (Against All Authority), une institution française de l'e-sport. Tout le monde prédit une défaite écrasante.

Le match est serré. ARZ perd 2-1, mais les deux games perdues se jouent à quelques secondes près. La performance est remarquée. Sur les forums, on commence à parler de cette "petite équipe lyonnaise qui a tenu tête à aAa". C'est un début.

Octobre-Décembre 2013 : La Construction

Les trois derniers mois de 2013 voient ARZ affiner son identité. Ils développent leurs premières stratégies originales (les prémices du futur "Flood & Freeze"). Ils commencent à être reconnus dans la communauté française. Quelques sponsors mineurs les contactent.

Surtout, ils apprennent. Chaque défaite est une leçon. Chaque victoire est analysée pour comprendre ce qui a fonctionné. Julien remplit maintenant son quatrième carnet de notes. Le groupe devient une vraie équipe, soudée par les épreuves et unie par un objectif commun.

L'Héritage des Origines

Quand on analyse le succès futur d'ARZ, tout remonte à ces années d'origine. C'est là que s'est créée la culture de travail acharné, l'amitié indéfectible, et cette faim de victoire qui les caractérisera. Comme le dira AroZen des années plus tard :

"Les gens se souviennent des victoires aux Worlds, des pentakills en finale, des trophées. Mais moi, je me souviens surtout de ce garage froid où on claquait des dents en jouant, des kebabs qu'on partageait à cinq avec 10 balles, et de Lucas qui dormait sur un canapé défoncé. C'est là qu'on est devenus Arozoir. Le reste n'était que la conséquence."